7 juin 2016

Services et tiers lieux

 

Expérimenter des environnements de travail innovants, flexibles et sécurisés

Mise à jour le 25 octobre 2016

La recherche porte sur l’expérimentation d’environnements de travail flexibles et sécurisés

Elle se pose la question de savoir à quelles conditions ce type d’environnements peut constituer une ressource pour les travailleurs du savoir.

Innover en matière d’environnements de travail (contexte)

Les concepts d’aménagement des espaces de travail tertiaires qui s’imposent encore dans une grande majorité d’entreprises s’organisent autour d’un principe simple : un poste de travail pour une personne sur un site de production unique. Ce principe se voit aujourd’hui réinterrogé à la faveur d’une combinaison de facteurs.

Premièrement, la pression sur les coûts immobiliers rend les directions attentives à toutes les solutions qui permettraient de les maîtriser. A l’heure où l’on constate que sur une journée de travail observée,  la moitié des postes en moyenne sont inoccupés, attribuer un poste fixe à chaque salarié apparaît parfois comme coûteux voire inefficace. De plus en plus d’entreprises sont ainsi tentées de recourir, au moins pour une partie de leurs collaborateurs, au partage des bureaux (« desk sharing » ou « flex office ») afin d’optimiser l’occupation des surfaces. Toujours dans une logique de rationnalisation des coûts, nombre d’entre elles font le choix d’implanter ou de déplacer leurs sites en périphérie des grandes métropoles, dans des zones moins bien desservies que les centres-villes, mais qui présentent des coûts locatifs sensiblement inférieurs.

Parallèlement, le développement des TIC et la porosité entre vie professionnelle et vie privée qui concerne une proportion croissante de cadres amène ces derniers à travailler fréquemment depuis une pluralité de lieux, souvent prévus pour d’autres fonctionnalités : domicile, transports en commun, chambres d’hôtels, cafés, etc. Dans ce contexte, le recours au télétravail se présente aux entreprises comme une solution pour éviter la fatigue, le stress et les pertes de temps liés aux déplacements pendulaires. Il apparaît aussi comme un moyen de répondre à des attentes  des salariés en termes d’autonomie dans l’organisation du travail et d’équilibre entre les temps de vie. De leur côté, les autorités publiques comptent sur son développement pour faire face aux défis posés par les phénomènes de pollution atmosphérique et de congestion, ainsi que pour revitaliser certains territoires périphériques.

Face à ces demandes, l’on assiste au développement de tiers-lieux (télécentres, espaces de coworking, business lounges, etc.) qui prennent la forme d’une offre de services à destination des entreprises. Toutefois, si de telles solutions peuvent faire l’objet d’un compromis entre les différents acteurs intéressés (directions d’entreprise, salariés, collectivités, etc.), les environnements de travail qui en résultent, pris dans leur ensemble (la totalité des lieux de travail), ne peuvent être pertinents qu’à condition d’intégrer une réflexion sur le travail et les conditions de sa performance. L’enjeu pour les entreprises devient alors d’offrir à leurs salariés un environnement de travail (matériel, technologique, social) qui prend acte des besoins de mobilité tout en leur fournissant, à travers une diversité d’espaces et d’outils, les ressources qui leur permettent de réaliser au mieux leur activité. Approcher ces objectifs nécessite alors d’adopter une approche globale des services environnement de travail, de l’aménagement des espaces aux technologies qui soutiennent le travail et la coopération à distance.

Expérimenter : observer le travail pour concevoir ses espaces (motivations de la recherche)

Les sciences sociales qui s’intéressent au travail s’accordent sur l’existence d’un écart irréductible entre le travail prescrit (ce qui est attendu du travailleur et formalisé dans les process, les fiches de poste, etc.) et le travail réel, tel qu’il est effectivement réalisé au quotidien dans chaque situation particulière. De la même manière, et sans doute de façon liée, il existe toujours un écart entre les usages d’un espace anticipés par ses concepteurs et suggérés par l’aménagement (les affordances) et les usages effectifs de cet espace par ses habitants.

Partant, innover en matière d’environnements de travail ne peut plus seulement consister à concevoir, in abstracto, des espaces et des services à partir d’une représentation du travail constituée a priori, sur la base du prescrit. A l’inverse, cette démarche implique d’observer, dans le détail, le travail et les usages de l’espace, bien au-delà d’une classification des activités et d’un relevé des taux d’occupation. Une telle approche permet alors de mieux saisir ce qui, dans un environnement de travail, constitue des ressources (matérielles, techniques, mais aussi sociales, relationnelles, psychiques) ou au contraire des contraintes selon les différentes situations de travail observées. En complément de l’analyse de l’activité, il convient aussi de se rendre attentif à toutes les autres logiques qui interviennent dans le choix des espaces et leurs usages (dynamiques affinitaires, stratégiques, contraintes privées, etc.).

Expérimenter un ensemble de services en environnement de travail, le mettre à l’épreuve du réel,   en accompagnement cette expérimentation d’un dispositif approfondi d’observation et d’analyse, semble donc être le moyen le plus pertinent pour l’ajuster, le compléter, délimiter son périmètre de pertinence et appréhender les règles qui doivent encadrer ses usages. A ce titre, les entreprises qui se livrent à une telle démarche se donnent l’opportunité de développer pour leurs collaborateurs des environnements de travail innovants et adaptés à leur contexte.

L’offre Bureaulib : une opportunité d’expérimentation qui en appelle d’autres (terrains de la recherche)

Génie des Lieux, membre du Consortium, ouvre un espace expérimental dès novembre 2016 pour tester un environnement de travail flexible et sécurisé, à travers une offre de tiers-lieux combinée à des services informatiques et de Facility Management (accueil, animation, etc.) et d’équipement, le tout regroupé sous l’appellation Bureaulib.

Le concept Bureaulib, repose sur les principes de mobilité et de partage, en interne (sur le site de rattachement des collaborateurs) et en externe (dans les tiers-lieux mis à disposition), avec un équilibre entre des services individuels (postes individuels non attribués) et collectifs (espaces collectifs mutualisés). Il vise à prendre en compte, à travers des espaces variés, la plus grande diversité possible d’activités et de situations de travail.

Pour concrétiser ce concept et l’expérimenter, Génie des Lieux pose les premières fondations d’un réseau de tiers-lieux d’entreprise, par l’ouverture (prévue pour novembre 2016) d’un espace rue Desaix dans le 15ème arrondissement de Paris, avec des capacités d’accueil de  (respectivement) 80 postes environ. L’accès aux espaces mis à disposition dans ce tiers-lieux et aux services associés sera proposé aux entreprises via des offres d’abonnement à l’heure (« Bureaulib café ») au jour (« Bureaulib Bibliothèque» pour les positions individuelles ou « Bureaulib Campus» pour les espaces collaboratifs) ou au mois (« Bureaulib Coprorate », pour les zones d’entreprise dédiées). Il sera par ailleurs organisé par un système de réservation des espaces.

Les entreprises qui feront le choix de faire travailler certains de leur collaborateur en mode Bureaulib bénéficieront des résultats d’une de recherche-intervention menée sur l’ensemble des entreprises qui auront tenté cette expérience. Ce « benchmark » et l’analyse qui l’accompagnera leur permettra de mieux appréhender l’opportunité d’étendre ce mode de travail à d’autres populations professionnelles, métiers ou activités,  avec des préconisations quant à l’accompagnement et l’appropriation de ce type d’environnements.

Un protocole de recherche-intervention pour convertir l’expérience en savoir

La recherche intervention menée sur cet axe par le Consortium prend la forme d’une de thèse de doctorat en sociologie du travail, en convention CIFRE accueillie par Génie des Lieux et le laboratoire LATTS (Laboratoire Technique Territoire et Sociétés) sous la direction de Pascal Ughetto, professeur à l’Université Paris-Est Marne-la-Vallée.

Elle se déroulera sur 3 ans et se décomposera selon les étapes suivantes :

Phase 1: Diagnostic et définition des premiers pilotes

  • Objectifs : Choisir les types de collaborateurs et d’activités pour l’expérimentation des environnements de travail innovants
  • Méthode : observation non participante, campagne d’entretien semi-directifs (collaborateurs, managers)
  • Calendrier : Octobre 2016 – Février 2017

Phase 2 : Observation des pilotes

  • Objectifs : observer les modes d’appropriation des nouveaux environnements de travail
  • Méthode : Enquête ethnographique, entretiens semi-directifs, analyse de l’activité
  • Calendrier : janvier 2017- septembre 2018

Phase 3 : Synthèse et restitution

  • Objectifs : faire la synthèse des résultats et dégager des recommandations
  • Méthode : traitement des données d’observation et d’entretiens et groupes d’auto-confrontation collective
  • Calendrier : Septembre 2018 – Septembre 2019