18 septembre 2025

CAHIER 39 – Document 1

Les jumeaux numériques de Thales, entretien avec Nicolas Cugier

Propos recueillis par Emma LEVESQUE

Diffusé le 23/09//2025, avec le soutien de l’IDET et du SYPEMI 

Etudiante à l’université Paris-Dauphine-PSL en fin de Master2 « Industries de Réseau et Economie Numérique (IREN) », Alternante à la Thales Digital Factory et préparant un mémoire sur « Les jumeaux numériques dans le secteur industriel : enjeux et futures tendances », j’ai souhaité recueillir le témoignage d’un acteur majeur engagé dans la mise en œuvre de jumeaux numériques.

 

Nicolas CUGIER, Directeur des Services aux Environnements de Travail du Groupe Thales et intervenant à l’Université de Marne La Vallée sur le BIM[1], a accepté cet entretien réalisé lors d’une session Teams en juin 2025.

 

Merci de m’accorder cette interview, j’ai une première question : pourquoi mettre en place des jumeaux numériques chez Thales ?

Le programme ASTREE lancé par Thales invite ses entités légales françaises à un déploiement systématique de jumeaux numérique sur leurs sites.  ASTREE fait suite au BIMLab, expérimentation qui a démarré en 2014 avec le nouveau site de Vélizy Hélios (100% tertiaire, 49 000m², 2 500 occupants), où l’équipe de conception avait utilisé une maquette numérique pour imaginer le bâtiment, maquette proposée au constructeur et récupérable par le preneur et son exploitant. Cette situation rassemblant le constructeur, le promoteur, propriétaire Covivio et Thales était une bonne opportunité pour utiliser et évaluer la pertinence de cet outil.

 

Quelques mois plus tard, Thales a lancé un autre programme, Mérignac (60 000 m², 2 500 occupants, 40% tertiaire & 60% industrie). Fort de l’acquis positif précédent, nous avons d’emblée imposé le jumeau numérique au concepteur, au constructeur et au propriétaire afin de pouvoir le mettre à disposition de l’occupant et de l’exploitant des installations.

 

Cette expérience BIMLab s’est développée des années 2014 aux années 2021, avant la crise COVID. Les premiers retours d’expérience (RETEX) obtenus ont été :

 

  • Des plans à jour et en 3D concernant les bâtis, tous les réseaux dont les réseaux électriques, CVC[2], VRD[3];
  • Des DOE[4] à jour ;
  • Des listes d’équipements et d’états d’équipements à jour.

Très rapidement, ces jumeaux numériques ont été exploités avec des processus de maintenance, toilettés et mis à jour. Ce BIMLab a permis de préciser la pertinence et l’intérêt d’exploiter un site avec un jumeau numérique. Au-delà de l’intérêt de disposer d’un référentiel unique du site, deux enjeux ont été travaillés :

 

  • Les processus de mises à jour des listes d’équipements, des plans, des DOE, en associant l’ensemble des entreprises intervenantes sur les sites ;
  • La connexion d’applications permettant de mieux utiliser la GTC[5], la GTB[6] et/ou de mieux comprendre l’usage du site au-delà des enjeux de maintenance, via la connexion de capteurs de présence, consommations énergétiques, etc. Le tout en conformité avec les différentes réglementations auxquelles Thales est assujetti.

Cette expérience de compréhension de l’intensité des occupations du site s’est révélée majeure. Elle est appuyée sur le constat d’une occupation réelle et non pas sur une liste théorique d’ayants droit d’accès à ce site ou de personnels qui ont été comptabilisés par les systèmes d’accès par badge ou identifiés numériquement sur le réseau informatique mais dont on ignore s’ils sont à leur bureau, dans des salles de réunion, dans les couloirs ou ailleurs.

 

On a voulu poursuivre l’expérience au-delà de sites neufs et tertiaires, en sélectionnant un site ancien avec des enjeux d’augmentation de production qui impliquaient des modifications de chaines de production.

 

En 2019-20, un jumeau numérique a été mis en place sur le site d’Etrelles. Ici, l’équation était différente : on ne récupérait pas une conception et une construction neuves livrées avec un jumeau numérique, mais un bâtiment avec des plans et des listes d’équipements qui avaient leurs histoires, imperfections et souvent lacunes.

 

Notre décision a été de scanner le site en 3D sous la surveillance à la fois de nos officiers de sécurité et de notre RSSI[7], et de parfaire le recensement des équipements existants. Tout ceci au profit des occupants, mainteneurs et propriétaires, avec mise à disposition auprès de la direction industrielle permettant de réfléchir à la meilleure implantation des lignes de production présentes ou futures.

 

Au regard des trois expériences Hélios, Mérignac et Etrelles, Thales a confirmé la faisabilité et la pertinence de la mise en place des jumeaux numériques au regard des enjeux immobiliers, d’optimisation de l’exploitation, de modification ou de création de lignes de production. Lors de la crise COVID, les jumeaux numériques ont ainsi permis de répondre rapidement à de nombreuses questions posées à la fois par HSE[8] et les différentes autorités de tutelle. Il en est de même actuellement pour les réponses aux demandes de conformité aux réglementations existantes mais aussi en anticipation des demandes futures. Le jumeau numérique est une bibliothèque vertueuse, un référentiel documentaire unique, stabilisé et mis à disposition à la demande et dans des formats pilotés par Thales. Il invite à professionnaliser les activités de maintenance et de gestion des sites.

 

 

En 2023, le GT BIMLab a décidé de généraliser auprès des huit entités légales du groupe sur une base de volontariat, au travers du programme ASTREE, la mise en place de jumeaux numériques sur les sites Thales.

 

Aujourd’hui, dans un contexte réglementaire dense – décret tertiaire[9], BACS[10], APER[11], LOM[12], etc. – et de production croissante impulsée par l’environnement géopolitique, le jumeau numérique se révèle un formidable outil de gestion patrimoniale au profit des enjeux de production et d’efficacité.

 

Vous travaillez avec TwinOps, appellation commerciale de l’offre BIM chez Vinci, mais je suppose qu’il y a d’autres acteurs, notamment pour le scan des sites. Dans la construction d’un jumeau numérique et dans la maintenance, qui sont vos principaux partenaires ?

A la fin du BIMLab, en 2021, nous avons séparé les activités de maintenance / exploitation, des activités de fabrication, mise en œuvre et exploitation du jumeau numérique.

 

En effet, chez Thales pour les sites français, l’exploitation multi-technique et multiservice des sites est confiée essentiellement à une seule marque commerciale – Faceo devenu Vinci Facilities – regroupant 7 entités légales au sein d’un programme et contrat unique appelé CopernIIc, Faceo ayant été une spin-off de Thales dans les années 1990.

 

La création et l’exploitation du jumeau numérique sont confiées à une autre entité légale du groupe Vinci, Primatice, dans le cadre d’un autre contrat, indépendant de CopernIIc. Primatice appartient aussi à la marque commerciale Vinci Facilities.

 

Le processus de création d’un jumeau numérique, en dehors d’un site neuf, est le suivant :

 

  • Audit de situation par Primatice permettant d’établir ce que l’on peut déjà construire à partir des documents existants avant d’imaginer compléter cet existant. L’audit porte sur :
    • Recensement quantitatif et qualitatif des plans existants ;
    • Liste des équipements ;
    • Tous documents traçant les travaux, opérations de maintenance, modifications de surfaces/natures de surface, type d’activité, vie du site, etc.
  • Le complément est réalisé via une opération de « scan » conduite par un sous-traitant de Primatice, la société Axéo FM (axeofm.com), qui agit comme maitre d’œuvre dans le cadre d’un processus défini par Thales en conformité avec la réglementation et les autorisations délivrées par les autorités de tutelle concernant les locaux à scanner, les équipements de scan et les personnes habilitées à réaliser l’opération. Ce scan donne lieu à un « nuage de points » qui est « blanchi » par Thales avant mise en production.

A la fin de ce processus, Thales dispose de l’ensemble des informations permettant de « fabriquer » numériquement le site, comprenant les réseaux, plans, équipements, courant fort, courant faible selon différents niveaux de précision (8 niveaux maximum à ce jour, du bâtiment jusqu’à la prise de courant).

 

Ce nuage de points dans son intégralité, y compris ce qui a été blanchi par la sécurité, est conservé chez Thales.  On ne modélise pas l’ensemble des organes de sécurité des sites Thales mais on laisse la possibilité aux officiers de sécurité de fabriquer à terme leurs propres jumeaux numériques concernant les organes de sécurité.

 

Est-ce que les jumeaux numériques sont stockés sur vos propres serveurs ?

Les jumeaux numériques fabriqués sont logés dans un « nuage » informatique thalésien concédé en l’espèce chez un opérateur régalien comprenant l’ensemble des clés et tunnels de cryptage qui sont nécessaires.

 

Nous avons la capacité d’extraire une information (plan/liste des équipements/VRD/etc.) pour l’adresser à un maître d’œuvre attributaire de travaux sur le site.  Les informations nécessaires sont extraites, filtrées et envoyées en imposant le respect d’un mode de fonctionnement compatible du jumeau numérique permettant de disposer en retour de DOE et plans compatibles avec une injection future dans le jumeau numérique existant.

 

Il est aussi possible de connecter des applications, en complément de la GTC qui approvisionne ce jumeau numérique, pour une meilleure conduite des installations, des énergies, le comptage des personnels présents, des applications concernant la propreté, l’accueil, etc.

 

Thales considère le jumeau numérique comme la moelle épinière de son exploitation bâtimentaire sur laquelle les applications de conduite des installations et de compréhension des usages des sites viennent s’articuler.

 

Le jumeau numérique implique à la fois une discipline partagée avec tous les acteurs et un changement de paradigme sur la façon dont on exploite un bâtiment : il ne s’agit plus de réaliser une suite de tâches et d’activités immobilières mais de raisonner dans un continuum serviciel immobilier. On sort ainsi du piège infernal de la multiplicité des plans, listes, références, jamais à jour ni homogènes et encore moins partagés.

 

En 2014 et avant de lancer le BIMLab, vous n’aviez pas vraiment de données pour appuyer le déploiement de jumeaux numériques, quelles ont été les motivations et arguments avancés auprès du Groupe ?

Nous avions fait le constat d’une absence générale d’informations précises et homogènes concernant nos sites. Les propriétaires et les mainteneurs, au-delà des postures, émettaient le même constat. J’ai découvert un monde et un métier où il semblait habituel de travailler avec un référentiel documentaire fragile. Nous avions donc atteint un plafond de verre, actant d’une forme de spirale mortifère technique et financière si nous poursuivions l’exploitation des bâtiments sans référentiel commun, condamnés à sans cesse recommencer des opérations de recensement, relevés de plans, audits, etc.

 

Par ailleurs, nous avions constaté la nécessité de mise en place d’un coffre-fort numérique permettant de contrôler et d’archiver toutes les informations concernant les sites en toute sécurité. Je n’ai vu que trop souvent des plans détaillés et étalés sur les planches de bord des véhicules des entreprises intervenantes.

 

Le jumeau numérique a un coût important aujourd’hui encore et pour de nombreuses entreprises cela peut représenter un frein à l’adoption. Quelle est la balance coûts/gains du jumeau numérique ?

J’ignore ce qui vous fait dire que le jumeau numérique a un coût important. On peut oser le parallèle avec l’éducation, « si vous considérez que la connaissance coûte cher, essayez l’ignorance ».

 

Chez Thales, nous considérons que le jumeau numérique est d’une grande valeur. Plutôt que de payer des  personnels de maintenance à courir dans les couloirs pour recenser les robinets, les pompes, les CTA[13], les circuits et réseaux, les consommations énergétiques, payer des dizaines de personnes à faire et refaire sans cesse des audits, payer des géomètres, des architectes pour à chaque fois mesurer, remesurer, revalider, recenser ce qui avait déjà été fait un an, deux ans, trois ans auparavant, on considère qu’il vaut mieux investir dans un jumeau numérique et son processus de mise à jour.

 

Savoir combien les opérations mentionnées ci-avant coûtent, je l’ignore, en revanche les bailleurs précisent souvent qu’un bien sans BIM est valorisé 15% moins cher qu’un bien avec BIM… Nous considérons chez Thales que le jumeau numérique est un élément constitutif de la valeur du site, même si nous n’en sommes que locataire.

 

Auriez-vous des chiffres sur le coût d’un jumeau numérique sur un site comme Hélios par exemple ?

Sur un site comme Vélizy Hélios (49 000m²), le coût d’un jumeau numérique a été entre 300 000€ et 350 000€ partagé entre bailleur, occupant et exploitant. Chaque année on met sur la table 50 000€ pour la maintenance et la mise à jour, à comparer au montant des loyers et charges pour 49 000m² en proche banlieue parisienne. Au regard de la valeur patrimoniale du bâtiment et surtout des enjeux de maintenance, ce coût nous semble faible.

 

En revanche la valeur nous semble importante. Si je n’ai pas de jumeau numérique et que j’ai besoin de recenser les surfaces, équipements et documents sur un site, cela va mobiliser une personne à temps plein pendant plus de 9 mois pour 49 000m², 100k€ minimum, chargés, pour une simple opération de recensement. Même chose pour lister un type d’équipement particulier, des natures de surfaces compatibles du décret tertiaire par exemple, etc.

 

La vraie rentabilité se mesure en valeur immatérielle induite par la connaissance du site, la façon dont il fonctionne, la capacité de répondre à de multiples questions, la façon dont on va pouvoir intervenir pour modifier telle cloison, tel emplacement, salle de réunion, ligne de production, optimiser les consommations énergétiques, etc. On est aussi capable de simuler l’intensification ou la réduction du nombre d’occupants et l’impact sur le bâtiment et les équipements. Cette capacité de modélisation est d’une très grande valeur.

 

On sort du paradigme « l’immobilier, valeur d’ajustement de la marge nette opérationnelle de l’entreprise », pour devenir « l’immobilier, contributeur majeur de la valeur produite par l’entreprise »

 

A partir du moment où la décision d’appliquer un jumeau numérique à un bâtiment est prise, quelle est la durée du déploiement ?

En fonction des surfaces et de la complexité des bâtiments, il faut en moyenne 9 mois de gestation entre le lancement du projet et l’utilisation de la maquette. Ce temps se décompose de la façon suivante pour un site existant, dans la mesure où les processus de gestion du projet et budgets ont été établis et validés au préalable :

 

  • Audit des documents existants : 1 mois pour 1 personne ;
  • Stratégie de compléments aux documents existants : 1 mois pour 1 personne ;
  • Scan du site : 1 à 2 semaines avec une équipe dédiée de 3-4 personnes ;
  • Nettoyage du nuage de points : 15 jours à 1 mois à 2 personnes ;
  • Création de la maquette : 2 mois pour 1 à 2 personnes ;
  • Contrôle de la maquette avec réconciliation des équipements et réseaux : 2 mois pour 1 personne ;
  • Formation des équipes utilisatrices : 1 semaine x 3 avec piqures de rappel après les premières utilisations.

Pour un site neuf, c’est plutôt 2 mois à 2 personnes pour réconcilier la maquette reçue et le réel car ce qui a été construit et installé n’est pas toujours conforme à ce qui avait été prévu dans le dossier initial.

 

Vous parlez de simulations sur la capacité d’accueil, est-ce que vous avez d’autres types de simulations, par rapport à l’énergie notamment ?

La simulation des consommations énergétiques est majeure. La simulation de l’intensité d’usage de type « combien de personnes dans cette zone, à quel moment et pour quoi faire ? » est importante car elle permet de définir l’usage des bâtiments et de simuler les densifications ou les allégements.

 

Nous avons réalisé nos premières simulations concernant l’utilisation des sanitaires, essayant de rapprocher les horaires de passage des agents d’entretien et les points horaires d’usage des sanitaires par les occupants ainsi que les satisfactions mutuelles des occupants et œuvrants : à la suite de cette simulation, les tournées ont été réorganisées et une communication auprès des utilisateurs concernant le bon usage des sanitaires a été déployée simultanément.

 

La simulation pour des travaux futurs est l’usage le plus immédiat pour tous les acteurs : connaitre les lieux, les servitudes, les fluides et évaluer l’impact en cas de travaux fait gagner un temps précieux et limite les surprises inhérentes aux travaux, que ce soit pour des besoins de réaménagement mais aussi et surtout pour des modifications des processus de production, y compris des modifications de lignes de production.

 

Grace aux outils numériques et aux différents capteurs, il est possible d’obtenir un nombre infini de données : pour autant, cela invite à une grande capacité d’analyse au regard de chaque contexte permettant d’en déduire des politiques et/ou des usages pertinents.

 

Avez-vous la capacité d’appliquer directement sur des surfaces une simulation optimale ?

L’intérêt du jumeau numérique c’est de « stresser » un site avec des hypothèses volontairement extrêmes. Par exemple, aujourd’hui j’ai 800 occupants et je veux modéliser l’occupation à 1200 occupants : quelles sont les conséquences en termes de surface, flux de personnes, fluides CVC[14], CFO[15], énergie, etc. ? Un jumeau numérique c’est la possibilité de tester des hypothèses et de comprendre les limites du bâtiment et des infrastructures.

 

Avez-vous mis en place des jumeaux numériques sur sites de production ?

Les plus grands utilisateurs de jumeaux numériques sont les personnels de production. Cela permet de simuler les changements de ligne de production, de machines, d’outils, d’intensité cinématique des flux (où placer les machines pour permettre le déplacement des techniciens, des chariots, où connecter les servitudes etc.). L’industrie étant dans une culture « Lean » de la modélisation de production depuis de nombreuses années, c’est l’immobilier qui comble ici son retard.

 

Vous parlez d’un jumeau numérique à l’échelle du bâtiment, existe-t-il des jumeaux numériques à l’échelle des machines ?

Les huit niveaux définis permettent de décrire un groupe froid jusqu’au diffuseur final. Lors de la création des nuages de points au moment du scan, il est aussi possible de scanner la ligne de production qui sera complétée via une réconciliation avec les opérateurs machines et/ou les constructeurs d’équipements. N’oublions jamais que le bâtiment est au service de la production et pas l’inverse.

 

Qui est en charge des simulations sur chaque site ? Est-ce que ce sont des équipes du BIMLab ou chaque BIM manager de site ?

Nous travaillons actuellement sur ces sujets, après la partie technique on affine désormais la partie organisation et gouvernance. Cela pose la question de la création (ou pas) de poste repère chez Thales, de fonctions attachées à cette activité de BIM manager. Aujourd’hui, le BIM manager est externalisé chez le mainteneur mais il ne dispose pas de capacité d’architecte de système d’informations de jumeaux numériques. En effet, il ne s’agit pas simplement de numériser un site, il faut aussi concevoir le système d’information, les niveaux de précision, les échanges, les sécurités nécessaires, les droits et prérogatives de chacun pour un site mais aussi tous les sites Thales.

 

C’est une question qui est ouverte à ce jour, j’ai déjà beaucoup de réponses, sachant qu’il faut convaincre les entités légales occupantes d’entrer dans ce métier, que ce soit réalisé en interne ou externalisé, et comprendre l’enjeu stratégique de cette activité.

 

Donc pour l’instant chaque site a un BIM manager qui lui est dédié ?

Absolument, chaque réunion mensuelle de programme ASTREE nous permet de coordonner l’ensemble des actions.

 

Avez-vous une politique de réduction de l’empreinte carbone lors du déploiement du jumeau numérique ?

Il existe une politique forte pour « décarboner » les activités du Groupe Thales avec un objectif net « zéro » en 2050. Ma responsabilité est la déclinaison de cette politique au niveau de l’exploitation des sites, y compris à l’appui d’un outil comme le jumeau numérique. Le BIM permet de comprendre la façon dont on consomme du carbone sur les sites et comment on va pouvoir réduire cette consommation. 

 

En discutant avec les développeurs de logiciels, un intérêt a émergé pour l’IA, notamment pour identifier les objets après le scan et pour en permettre un déploiement plus rapide.  Est-ce que vous y voyez un intérêt ? Quelle place des agents d’IA pour retrouver des assets dans cette bibliothèque référentielle ?

Aujourd’hui je réserve ma réponse. Je vois bien que l’usage des systèmes d’intelligence artificielle est pertinent lorsqu’on commence à disposer de grands volumes d’informations, pour recenser de nombreux équipements, classer/discriminer les équipements, les surfaces, les usages. Cela permet de poser des questions et d’avoir des réponses synthétiques. En revanche il reste nécessaire de contextualiser les réponses. Concernant les usages des bâtiments et leurs variabilités, même chose, des synthèses certes mais il faut les contextualiser à chaque fois et ne jamais oublier qu’à la fin ce sont des humains qui rendent des services pour d’autres humains. C’est la qualité de la relation entre ces humains qui fait la pertinence du service et crée un impact utile pour les bénéficiaires et les œuvrants.

 

Comment est organisé le BIM Lab, taille de l’équipe, rôles ?

Le BIMLab a été renommé projet ASTREE. Je conduis avec Mathieu Rigaud de la société Primatice, une réunion de management de programme tous les mois en invitant les sites qui adhérent au programme BIM ou qui souhaitent le rejoindre. Toutes les initiatives, innovations et bonnes pratiques mises en œuvre avec ce jumeau numérique sont recensées. Nous avons ainsi forgé des processus et un cahier des charges type pour un BIM mais aussi pour une gestion technique centralisée, GTC.

 

Des rôles sont-ils amenés à évoluer, à être créés autour des jumeaux numériques à la suite de nouveaux besoins ou pratiques ?

Au-delà des BIM managers et au-delà des architectes, il y a un enjeu RSSI qui est de plus en plus important à traiter et conditionnera l’avenir, au-delà de la mise à jour permanente des jumeaux numériques.

 

 

[1] Building Information Modeling.

[2] Chauffage Ventilation Climatisation.

[3] Voirie et Réseaux Divers.

[4] Dossier des Ouvrages Exécutés.

[5] Gestion Technique Centralisée.

[6] Gestion Technique de Bâtiment.

[7] Responsable Sécurité des Systèmes d’Information.

[8] Hygiène, Sécurité, Environnement.

[9] Décret n°2019-771 du 23 juillet 2019 relatif aux obligations d’actions de réduction de la consommation d’énergie finale dans les bâtiments à usage tertiaire.

[10] Building Automation and Control Systems, voir les articles R.175.1 à R.175.5.1 du Code de la Construction et de l’Habitation. Ces textes visent à optimiser la performance énergétique des bâtiments.

[11] La loi APER (loi n° 2023-75 du 10 mars 2023) complète le dispositif de la loi Climat et Résilience (panneaux photovoltaïques, dispositifs végétalisés, ombrières etc.).

[12] Loi d’Orientation des Mobilités, loi n° 2024-310 du 5 avril 2024.

[13] Centrale de Traitement d’Air.

[14] Chauffage, Ventilation, Climatisation.

[15] Courant Fort.