Travail et emplois serviciels

Xavier BARON. Petit déjeuner TEDIS (Territoire et dialogue social) le mardi 9 janvier 2018

Sortir les services FM de l’impasse industrialiste par la recherche et l’expérimentation ?

Nous avons demandé à Xavier Baron de nous faire part des travaux qu’il mène avec quelques grandes entreprises clientes et prestataires, sur les enjeux d’émergence et de structuration du secteur du Facility Management, services aux immeubles et aux habitants en B to B.
Essentiellement constitué de main d’œuvre (de l’ordre de 1,5 million d’emplois), relativement peu qualifiées et connaissant des conditions de travail difficiles (horaires, isolement, faible reconnaissance…), le secteur du FM est né de l’externalisation des activités des services généraux et de la maintenance immobilière. Dans le tertiaire, ces activités constituent souvent le deuxième poste de coût après les salaires.
Alors que c’est un secteur d’avenir (environnement, QVT…), pour des activités non délocalisables et faiblement automatisables, il est fortement contrarié dans son développement par les représentations, les outils de gestion, les pratiques d’achats comme de contractualisation.

C’est le constat publié en Janvier 2016 par le principal syndicat patronal de ce secteur, le SYPEMI, dans un livre blanc rédigé par Xavier Baron ; Le FM à la croisée des chemins ».http://sypemi.com/wp-content/uploads/2016/05/SYPEMI_LIVRE-BLANC_HD.pdf

Depuis le milieu des années 1980, nous vivons une période de mutation, encore accélérée par les technologies numériques. Nous sommes passés d’une économie tirée par l’industrie à une économie tirée par les services. Pour autant, les concepts et pratiques de gestion restent largement « industrialistes ». Le secteur des services en B to B, aux immeubles et aux habitants, est significatif et emblématique de cette mutation. La promesse de performance et de valeur de ces activités sont réduites à un calcul des coûts, lesquels sont à près de 90% en moyenne constitués de main d’œuvre, elle-même souvent rémunérée à proximité du du SMIC. Les processus de prescriptions comme d’achats sont fondés sur des rapports de défiance et sur des métriques inadaptées. La valeur produite est réduite à des ratios au m², les activités sont mal représentées par des SLAs et des KPI. Les jeux de sous-traitances en cascade autorisent la prédation de valeur et contribuent à la mise en invisibilité du travail.

Depuis 2008, faute de trouver un nouveau modèle d’affaire, ce secteur connaît une dérive dangereuse vers la baisse de la qualité et des politiques de déflation salariale. C’est enfin un secteur quasiment orphelin dans le champ des relations professionnelles.
Conscients de cette dérive, quelques grands donneurs d’ordre (Thales, EDF, Société Générale) ont décidé de créer en Avril 2016 un Consortium de Recherche avec des PME innovantes (Génie des Lieux, Steam’O) afin de contribuer à un investissement en R&D pour accompagner l’émergence de ce secteur. CF. https://crdia.org/
C’est en soi une structure innovante dans la recherche en sciences sociales. Son programme en cours de déploiement est un investissement intellectuel et méthodologique configuré sur plusieurs années. Il associe des chercheurs et des universitaires. Il s’appuie sur différents axes de recherches et d’expérimentations complémentaires dont :
– La mesure de la valeur des services,
– La pertinence et l’évaluation de l’offre d’espaces de travail et d’aménagement comme services,
– L’innovation servicielle et la productivité du travail,
– L’innovation contractuelle.

http://www.metiseurope.eu/evaluation-des-services-de-la-qualite-la-pertinence-situee_fr_70_art_30635.html

Xavier BARON

http://www.xavierbaronconseilrh.fr/
Chercheur intervenant BCRH
Coordinateur du Consortium de Recherche de l’Ile Adam
Professeur associé en sociologie à l’UVSQ, Professeur affilié ESCP Europe