6 décembre 2024

CAHIER 35 – Document 1

Valoriser le travail par l’impact utile des productions.
De l’avoir à l’usage

Xavier Baron, consultant BCRH, Sociologue, co-fondateur et coordonnateur du CRDIA

Diffusé le 10/12/2024, avec le soutien de l’IDET et du SYPEMI 

Créer de la valeur n’est plus seulement conditionné à une transformation de la matière, mais à la capacité de garantir une pertinence située d’usages enrichis des productions. Jouir de la valeur d’un support (de confort, de mobilité, de travail) n’exige pas nécessairement la possession individuelle. La valeur est et sera de plus en plus conditionnée à la capacité de bien utiliser, de faire durer ce qui est déjà en usage et qui mérite de le rester, ce qui peut et doit être réemployé. « Faire tenir », entre tenir, maintenir, c’est-à-dire, produire et accroître la durée d’usage en garantie de performance fonctionnelle, est le levier de valeur que mobilise la maintenance.

 

Les Services aux Environnements de Travail[1] qui nous intéressent ici, relèvent de la maintenance des choses et du soin des hommes au travail. Dans ce 21ème siècle, ils prennent une importance centrale, mais à condition de ne pas être gérés comme des biens tangibles. Ce sont des services à forte intensité de main d’œuvre, relationnels et à exécution successive. Ils sont aujourd’hui très mal pris en compte par les préceptes tayloro-fayolo-fordiens[2] et les instrumentations de gestion hérités de l’industrie.

 

Pour améliorer la productivité du travail serviciel devenu largement majoritaire, dépasser la spirale qui tire beaucoup de services (et les prix) vers le bas et promouvoir le travail d’œuvrants tout à la fois indispensables, invisibles et mal traités …, il faudra sans doute une volonté politique et de nouveaux rapports de force. Mais il faudra également (préalablement ?) revisiter les concepts de qualité, de gestion et de mesure de la valeur des services.

 

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Un changement de paradigme économique

Depuis 50 ans et le rapport du Club de Rome (« Les limites de la croissance », 1972), la prise de conscience s’opère progressivement de la fin du grand cycle de la révolution industrielle. Ce qui est annoncé n’est pas la fin de toute croissance, mais celle d’une certaine forme de croissance économique. Dans un ouvrage extraordinairement clairvoyant, Orio Giarini et Walter R. Stahel, présentent dès 1990 les risques et les enjeux auxquels nous faisons toujours face 35 ans plus tard. Nous ne sommes plus dans la croissance économique « qui repose à la fois sur le développement d’outils de plus en plus puissants et de plus en plus rapides, sur des investissements plus matériels qu’intellectuels, sur le développement de machines au détriment de l’organisation, sur les produits tangibles au détriment de la communication ». « Bien évidemment, une part importante de l’économie reposera toujours sur l’outil et le matériel (hardware) et nous ne pourrons jamais nous passer de l’agriculture. Mais de nos jours, ces éléments n’entrent plus que pour une modeste part dans la somme de travail vraiment générateur de richesses et de bien-être »[3].

Les conséquences de cette évolution sont accélérées par les crises sanitaire, climatique et géopolitique. Pour les gestionnaires, économistes, politiques et partenaires sociaux, l’intuition puis la certitude sont acquises depuis plusieurs années. La crise climatique et l’effondrement de la biodiversité démontrent que la production économique n’est pas indépendante de dimensions du monde et du vivant qui ne sont pas monétarisées. Leur non-valorisation conduit à nier des pans entiers de création ou de maintien de la valeur.  A l’accroissement de la part des activités de services dans tous les domaines de la production de richesses[4] s’ajoutent la démographie vieillissante des sociétés occidentales, les rendements décroissants de la technologie et l’affaiblissement continu de la productivité apparente du travail. C’est dans ces directions qu’il convient de chercher des compréhensions des évolutions du travail, avec comme symptômes l’explosion des risques psychosociaux, l’absentéisme, la désertion des bureaux et le sentiment croissant d’être contraint à des « bullshits jobs sur gérés » à coup d’indicateurs pastèques et de contrats léonins[5].

 

Nous sommes déjà passés d’une approche de la valeur du produit[6]comme objet, à l’exigence d’une valorisation de systèmes[7] de production[8] en y intégrant sur la durée les usages et services[9] associés. « On passe en effet de la valeur de matériel à l’optimisation de fonctionnement »[10].  Pour Giarini et Stahel, dès la décennie 80, les lacunes de la pensée économique sont en cause : « Force est de constater que les ressources d’aujourd’hui se présentent sous la forme d’activités de services. Afin de mieux les mesurer et de mieux les exploiter, nous devons nous constituer un nouveau cadre théorique de référence (…)[11] »

 

Des qualités intrinsèques à la valeur d’utilité sociale

Les concepts en économie comme en gestion sont des actants[12]. Inadaptés, ils constituent des obstacles à la performance. Une pensée opératoire en gestion des conditions de la performance du travail serviciel reste à élaborer pour traiter des productions largement immatérielles et relationnelles. Le concept de qualité, par exemple, est communément mobilisé pour les services ; des services de qualité ou de qualité des services. On y associe des compléments ; une qualité relationnelle, expériencielle, ressentie, adaptée…, et des outils ; KPIs[13], contrôles, reportings. En pratique, ce concept mais également ceux de valeur, productivité, ROI[14], prix fixé par transfert de droit de propriété, coûts de main d’œuvre artificiellement allégés de charges, résultats…, appliqués aux services sont inadaptés voire contre-productifs. 

 

Ce n’est pas seulement une affaire de qualitatif opposé au quantitatif. Le problème n’est pas d’abord dans l’immatérialité de productions non tangibles, non mesurables/non dénombrables. Il n’est pas seulement question d’évaluer le subjectif au-delà de l’objectivable[15]. La notion de qualité est assez large pour recouvrir toutes ces dimensions. Ces productions servicielles ont des caractéristiques en retour sur le travail qui exigent de les prendre en compte distinctement des productions industrielles.

 

L’usage courant qui est fait de la notion de qualité est insuffisant pour appréhender les dimensions de valeur des productions. Cette notion est, dans la pratique, trop souvent contreproductive pour évaluer les services, et notamment, les services à forte dimension relationnelle[16]. La valeur produite par ces services ne se limite pas à la seule dimension intrinsèque de la définition des activités de service ; la mise à disposition temporaire d’équipements et/ou des personnes/compétences. Elle ne se réduit pas au constat de l’exécution conforme d’une prestation.

 

La valeur de la production d’un service est dans une modification de l’état du bénéficiaire ou de l’environnement du bénéficiaire[17]. Une automobile considérée comme un produit (ce qu’elle est) a des caractéristiques tangibles et mesurables. Elles permettent de décrire et de s’accorder sur une des dimensions de sa qualité. Comme support de service – ce qu’elle est également – une automobile n’est pas seulement un objet que l’on peut acquérir. Elle est utile comme moyen de mobilité, de liberté, de valorisation de soi…, mais un véhicule en propriété n’est pas nécessairement le support le plus « approprié » à tous les usages réels d’un propriétaire, et comme tel, exclut d’autres usagers. De la même façon, l’accueil, l’entretien d’un immeuble de bureaux, la sécurisation des accès…, valent pour eux-mêmes (satisfaction), mais surtout pour l’enrichissement des actifs que sont les personnes qui en bénéficient (capacités améliorées) et les actifs immobiliers qui les environnent. Au-delà de l’avoir ou d’une modalité de mise à disposition temporaire de compétences, l’utilité sociale du service réside dans une modification favorable de l’état du bénéficiaire. Bien accueilli dans un immeuble sécurisé et constituant un environnement de travail favorable, il bénéficie d’aménités et sera en principe dans une capacité accrue de bien faire son travail. Il sera aussi d’autant plus incité à s’y rendre.

 

Ce que le travail fait dans les services…, au-delà de l’exécution d’une tâche

Définir les services comme la mise à disposition temporaire d’un bien, d’un équipement ou d’une compétence n’est pas faux, mais omet l’essentiel. La valeur n’est pas acquise dans le Quoi (l’exécution d’une tâche), mais dans le Pour Quoi (de l’activité), et toujours en situation spécifique définie par une relation entre un œuvrant et un bénéficiaire. La qualité d’un service n’est pas dans le fait d’être exécuté, mais dans sa pertinence en situation, un impact utile modifiant favorablement l’état du bénéficiaire et/ou de son environnement…

 

L’enjeu économique et social d’une bonne définition des services est important aussi bien pour les bénéficiaires que pour les œuvrants. Désigner et évaluer la qualité d’une production servicielle revient à juger de la qualité du travail incarné et personnalisé qui est à son origine. Dans les services, plus encore que dans l’industrie, le travail et sa production sont inséparables[18] de celui qui les met en œuvre, et cela toujours dans un contexte donné. L’évaluation touche toujours plus ou moins aux personnes… Ne regarder que la qualité « visible » d’un output occulte la valeur de pertinence et l’importance de l’intelligence déployée à un moment donné dans un contexte donné.

 

Dans les activités de nettoyage, la valeur dans la propreté n’est en effet pas le seul fait d’un enlèvement de salissure exécuté dans les règles de l’art ou conformément à un cahier des charges. Elle est dans l’impact utile d’un service sur l’état d’un environnement devenu « propre », c’est-à-dire « non sale », mais surtout adapté, pertinent pour les usages qui en sont faits. Il peut y avoir une part de réponse à des objectifs de l’employeur en termes de satisfaction, de plaisir, de manifestation du respect accordé aux occupants. Mais dans tous les cas, il s’agit surtout de moyens (une représentation d’une des conditions d’obtention) de performance au travail des bénéficiaires de l’espace. Bien évaluer la qualité d’un service de ce type (au-delà du temps passé, des produits et des machines utilisés…) par la propreté « utile » comme résultat fait surgir quatre difficultés.

 

  • 1) Personne n’est d’accord sur la définition technique de la propreté (raisonnable) ; brillance, absence de taches ou de poussières, netteté dans le rangement, sanitarisation des surfaces et de l’air ? Les « évaluations » varient d’une personne à l’autre, d’un genre à l’autre, d’un niveau social à l’autre, d’un point de vue à l’autre. Qui sait dire alors la qualité ? Il n’y a pas de réponse satisfaisante et opératoire en termes substantiels. Il faut en débattre.
  • 2) La pertinence de l’activité de nettoiement est concurrente d’une autre qui consisterait à éviter que cela soit sale ! La pertinence du nettoyage est par ailleurs fonction de la possibilité de comportements d’évitement du salissement. Bref, ce n’est pas le nettoiement seul qui fait la propreté, mais les occupants, les matériaux, la culture[19]…, c’est une coproduction.
  • 3) Quelle est l’utilité sociale, quel est le rendement d’un environnement raisonnablement propre ? Pourquoi faut-il que cela soit propre ? C’est la fonction de la propreté qui en fait la pertinence…, c’est-à-dire, l’effet utile sur les bénéficiaires réels (les seuls à pouvoir en juger).
  • 4) La propreté a un coût. Quelle est son importance relativement à un bon éclairage, des sièges ergonomiques, une restauration de qualité, des collègues avenants ? Gérer, c’est choisir. Rendre propre, c’est un investissement, avec des ressources qui ne sont jamais infinies. Le prix ici est un consentement à investir, et non un coût.

A défaut, la pratique consiste à rétribuer l’exécution de la prestation technique, le plus souvent à proximité immédiate du chiffrage de son coût (fréquentiels, durée, taux horaires…). La « qualité » d’un service de nettoyage habituellement prise en compte n’évalue ainsi le plus souvent que la conformité à des prescriptions qui sont elles-mêmes incapables de cerner aussi bien le « besoin » que le « résultat ». Ce sera donc, par défaut, une mesure rustique de l’activité (fréquence d’aspiration, de passage de shampouineuse…), multipliée par des temps et des taux horaires qui seront les référents de la qualité du service… Le problème se pose également pour « juger » de la qualité d’un service d’hôtesses d’accueil, d’un factotum ou d‘un agent de sécurité. Aucune production matérielle, aucune « trace » ne témoigne de leurs activités.

 

Cette absence de métrique explique pour partie l’engagement d’une spirale mortifère. Le prix étant référé au coût et le coût aux salaires, la seule manière de gagner en productivité est de faire des économies sur ce travail. Au-delà de la pression sur les cadences, de la limitation des coûts de structure au minimum (formation, encadrement, temps partiels, avantages sociaux…), la « compétitivité des prestataires » comme les résultats des donneurs d’ordres…, poussent à l’allègement des charges avec les effets[20] (déficit des comptes publics d’un côté et « smicardisation » de l’autre) que l’on connaît bien maintenant.

 

Intégrer les effets utiles, médiats et les externalités des services

La notion de qualité doit donc être revisitée pour les services. Dans ses acceptions courantes, elle minore à la fois les « effets utiles » lisibles seulement dans les usages et l’intégration des externalités, pour se focaliser sur les effets immédiats et sensibles de l’exécution technique de la prestation.

 

L’intégration de la pertinence d’utilité dans les processus ou dispositifs d’évaluation est essentielle pour la gestion et le management quotidien du travail dans les services. Elle est vitale pour les services aux environnements de travail. Les bénéficiaires ne sont pas des consommateurs. Le client, celui qui décide un niveau de consentement à la dépense, n’est pas toujours à proximité immédiate de la mise en œuvre. Il s’agit d’appréhender les dimensions fonctionnelle (la finalité, le pour quoi) et systémique de l’utilité sociale des productions des services, afin d’en valoriser la part substantielle (le quoi, y compris quand il est immatériel), au-delà de la seule considération de leurs coûts.  La valeur d’un service, qu’il soit purement relationnel ou informationnel (accueil par exemple), ou qu’il soit adossé à des supports (propreté d’un revêtement de sols textile), n’est pas lisible seulement par la considération des caractéristiques physiques, des propriétés mesurables et dénombrables. Un sourire, un renseignement, une moquette propre, une climatisation silencieuse…, ont une « valeur » de pertinence située, avant et au-delà d’être une « qualité » d’un support ou d’un service. Chiffrable ou non, cette pertinence est le résultat d’un processus d’évaluation. Cette évaluation sera fonction des acteurs plus ou moins clairement identifiés qui en jugent, dans un contexte et à un moment donnés. Ce processus relève d’un jugement de valeur pour l’estimer, et potentiellement, pour le monétiser et lui donner un prix.

 

L’impact d’un service est ainsi toujours plus ou moins indirect et il convient de le considérer sur la durée. Il ne se résume pas à un avoir que l’on peut acquérir par le transfert instantané d’un droit de propriété. Il porte sur un « état » des bénéficiaires, humains ou non humains. Un environnement sanitarisé, ou moins gourmand en énergie, ou encore doté d’un accueil favorable sont autant d’enrichissements de cet environnement, d’un territoire, d’un état sanitaire. Mieux nourrir quelqu’un dans l’immédiat, c’est améliorer sa santé dans la durée. Garantir la santé des plus démunis est un coût dans l’immédiat, mais un enjeu de santé publique à moyen terme. Ce sujet est bien connu des acteurs de l’Economie Sociale et Solidaire qui cherchent les moyens de la « mesure de l’impact social », en relation avec leur vocation d’utilité sociale[21].

 

La pertinence située

 « Les produits sont inutiles d’un point de vue économique, tant qu’ils ne sont pas mis à la disposition du client. (…) Dans l’économie de service, toutes les fonctions destinées à rendre la marchandise disponible absorbent, de loin, la plus grande partie des ressources lorsqu’on les compare à la somme d’efforts investis dans sa fabrication »[22]. C’est évidemment le cas de la maintenance et des services aux espaces de travail, à condition de prendre en compte en permanence les efforts consentis sur la durée d’utilisation des immeubles.

 

Un bureau de La Poste peut être moderne, esthétique, efficace techniquement et servi par des postiers compétents. C’est mieux que le contraire. Mais s’il est fermé quand je peux y accéder, il n’existe tout simplement pas pour moi. Sa pertinence d’accessibilité est une condition de valeur supérieure à ses qualités observables dans l’ordre du tangible ou de la conformité des prestations aux normes de qualité propres à cette institution. Ajoutons à la colocalisation, la concomitance ! Le travail en heures atypiques ou du dimanche n’est pas loin. Déjà, une certaine modernité des espaces de travail suggère de pouvoir accéder à son lieu de travail en 24/24 et 7/7. Les ordinateurs le font bien !

 

Prenons un autre exemple vécu dans une CAF (Caisse d’Allocations Familiales, observée dans les années 90). La qualité y était classiquement désignée (par les systèmes de gestion) dans les délais, les volumes et la justesse des prestations délivrées conformément à la réglementation. Elle était, secondairement, dans le nombre réduit de réclamations, et enfin dans la satisfaction exprimée par les allocataires. Un Directeur Général a exprimé une autre définition de la qualité de son outil de production ; pour lui, le sens du travail d’une CAF, c’était prioritairement de permettre aux plus démunis d’accéder effectivement aux prestations auxquelles ils avaient droit. Pour l’organisme pensé industriellement, c’était plus de coûts ; des allocataires qui précédemment n’arrivaient pas à accéder à leurs droits étaient alors accueillis et accompagnés. Pour les salariés, c’était plus d’efforts, des conditions de travail plus engageantes ; il est en effet plus difficile de traiter des exclus et des « très pauvres » que des familles « moyennes ». Il a fallu déménager pour s’en rapprocher géographiquement, se mettre à leur portée socialement et techniquement… Cette volonté a mis en avant la pertinence située du service (son utilité sociale) en plus de la performance industrielle, à même niveau de consentement collectif de la dépense de protection sociale. Il avait raison. La logique industrialiste et financiarisée (budgétaire) a pourtant eu raison de la logique servicielle et de la finalité même, sociale et politique, de l’activité de ce service. L’organisme est revenu quelques années plus tard à des « économies » de fonctionnement.

 

On connait ainsi dans les entreprises des agents qui nettoient, à heure fixe, là où on leur a demandé de le faire, mais pas toujours là où c’est sale…, en application stricte des prescriptions contractuelles. Pensons enfin aux dérives que connaissent les établissements de santé ou les scandales de maltraitance récemment dénoncés dans les EHPAD[23] et les crèches. La capacité à bien faire le travail de service en faveur de personnes fragiles n’est plus l’objectif. L’organisation, les effectifs et les procédures sont dominés par l’exigence de rentabilité. La pertinence et le sens même des activités sont occultés.

 

Une valeur co-construite en situation et à l’usage

Traiter des enjeux de gestion, de qualité de vie au travail et de mesures de l’activité (efforts et résultats) conduit à dépasser les acceptions usuelles du concept de qualité, héritées de l’industrie, au profit du concept de pertinence[24] à laquelle nous ajoutons « située[25] ».

 

Dans le luxe, les qualités des produits et des services, au sens de caractéristiques observables, mesurables, sont relayées par des effets de marques, de labels (AOC, Appellation d’Origine Contrôlée) et/ou des effets de consommations « positionnelles » (une Rolex avant 50 ans ![26]). Ce sont bien des actifs immatériels qui sont révélés dans la possession et l’usage. Ils sont valorisés sur un mode social[27]. Le camembert « de » Normandie n’est pas la même chose que celui qui est fabriqué « en » Normandie. L’actif immatériel existe bien, avant même de juger les qualités gustatives, nutritives ou sanitaires du fromage ou la justesse de l’heure indiquée sur un cadran de métal noble. De même, une compagnie aérienne low cost ne produit pas moins de qualité qu’une compagnie classique. Elle ne propose pas le même service quand bien même les clients voient également « leurs états dans l’espace » être modifiés avec des temps de transport très comparables. 

 

Une montre, une AOC, un service de transport, une voiture de luxe n’ont pas, en soi, une valeur fondée d’abord sur des qualités « tangibles ». On leur « donne » une valeur par des processus/dispositifs complexes d’évaluation prenant en référence une certaine utilité sociale de l’usage. Elle peut être de l’ordre de la survie (boire de l’eau) ou d’une volonté de séduction à l’aide de prothèses faisant étalage d’une appartenance et d’une réussite sociale. Qu’importe, et personne n’est légitime seul pour en juger. Mais dans tous les cas, la pertinence située de l’usage spécifique et particulier (singulier) explique mieux le consentement à la dépense et le prix que la considération de caractéristiques mesurables tangibles. Il en va de même pour les services, mais de manière exacerbée et complexifiée par l’intangibilité d’une part essentielle de la production ; une modification favorable de l’état du bénéficiaire… En effet, non seulement le bénéficiaire est nécessairement coproducteur de son propre état, mais il en est aussi le premier juge !

 

La relation comme levier de performance servicielle

La qualité dans les services, plus encore que dans l’industrie, est affaire de pertinence située, donc de coopération.  Elle est affaire d’accessibilité, d’utilité et d’usage. Elles sont contextualisées ; situées dans le temps et l’espace, jugées subjectivement sur un mode collectif et individuel. 

In fine, la contextualisation dont dépend la pertinence n’est opérable que dans l’intelligence des relations, nécessairement singulières, que les acteurs en contact sont en capacité de mener. La valeur est ainsi liée aux caractéristiques du support, des infrastructures, des technologies ou des compétences bien sûr, mais également à la capacité de co-construction, in situ, dans la relation, dans la « vraie vie et des vraies gens ».

 

En termes de productivité réelle, la valeur est dans la capacité à obtenir le meilleur compromis localement possible entre une offre plus ou moins générique et contrainte, et la réponse à une attente toujours spécifique, contextualisée, personnalisée et potentiellement infinie. Elle est dans la pertinence de l’action productive là où elle s’opère… Au contraire de la qualité d’un bien qui peut se penser objectivable, voire « totale », la pertinence servicielle est toujours l’affaire d’une intelligence elle-même située et relative à une co-construction.

 

Dit autrement, la valeur (et la productivité) que l’on recherche est dans l’intelligence du travail. Elle est dans la capacité de compromis, d’écoute et de négociation. Elle est dans l’engagement subjectif du prestataire (sa volonté, son intention, l’empathie) et la coopération avec le bénéficiaire. Elle est dans la capacité de modulation, d’adaptation, de tuning de la prestation… par l’œuvrant lui-même, et c’est toujours à l’occasion d’une relation singulière.

 

Certes, hors de la relation, des tâches concourant au service sont « exécutables ». Une bonne part des activités de services sont industrialisables, codifiables, standardisables, et donc mécanisables et automatisables à terme. Elles sont alors réduites à des « prestations » définies techniquement. Elles ne rendent pas le service, elles constituent des supports du service. L’automate fait (ou fera), mieux et moins cher, les tâches servicielles exécutables, y compris cognitives. Et c’est tant mieux. Mais c’est dans la relation – une intersubjectivité – que la valeur se « potentialise », se construit ou non. C’est dans le travail vivant, celui qui se confronte à l’écart, à l’autre, à l’imprévu, à l’aléa, au spécifique…, que se joue la valeur qui restera toujours à créer. Il faut de ce point de vue apprendre à penser les produits (y compris l’automate physique ou cognitif) comme des supports de services, au service des services et non l’inverse.

 

Les bâtis sont des supports de services

Dans la filière des services aux environnements de travail, le front est double. Il y a l’enjeu d’un traitement inadéquat du travail et des œuvrants des services, indispensables mais invisibles, autrement que par ses coûts. Il y a aussi l’enjeu d’une valorisation du capital que constituent les bâtis et les équipements de ces espaces. Leurs prix sont largement fonction de leur localisation et de niveaux de construction, puis des fluctuations d’un marché spéculatif. Si le thème marketing est présent déjà depuis quelques années, « Building as Services », ce n’est que dans l’après Covid et avec l’explosion du télétravail qu’émergent dans l’espace public des offres et des raisonnements de « bâtiment serviciel ».

 

Saluons ici le travail de défrichage et de synthèse opéré par la Chambre de Commerce et d’Industrie de Paris Ile de France avec plusieurs études[28] qui débouchent en juin 2024 sur une approche servicielle de l’immobilier avec « Itinéraire du bâtiment serviciel, de la vente des services à la vente des usages ».

 

Ces travaux d’analyse et de synthèse en empruntent à des travaux jusque-là restés « confidentiels », confinés à des lectorats de spécialistes. Emaillés d’exemples, ils mettent en perspective des innovations et des acteurs agissant en faveur d’une « pensée services » dans le monde du bâtiment. Cette étude discute la possibilité de vendre l’effet utile du bâtiment et non le bâtiment comme objet, et même le service associé. Cela suggère de basculer d’une approche centrée bâtiment à une approche centrée usager, de passer de la valeur mobilière ou d’échange à la valeur d’usage et, pour cela, de mettre en mouvement un jeu d’acteurs et de cartographier les bâtiments en fonction des utilités et non des loyers. L’objectif est de dégager les conditions d’une valorisation des bâtiments et services associés par les usages, voire par les résultats, et non par les coûts ou la valeur patrimoniale. Le fait que ce travail soit l’œuvre de la plus grande CCI de France est pour nous un signal important.

 

Prendre soin, faire durer et entre tenir

Pour les bénéficiaires des espaces de travail, humains et bâtis, les services aux environnements de travail assurent la possibilité même de transformer des surfaces en espaces productifs, puis de les « faire durer » au profit d’une qualité du travail des personnes prises en charge, et enfin, d’en faire des lieux hospitaliers. La production est immédiate et immatérielle, elle est aussi médiate (avec des effets différés et cumulés dans le temps) et socialement sensible. Elle n’est pas seulement de l’ordre du maintien d’un potentiel existant. Elle est dans une capacité dynamique d’enrichissement immatériel, continu et permanent des facteurs de production, et notamment dans la capacité de faire collectif.

 

Il est sans doute déjà trop tard pour briser le cycle du réchauffement climatique et l’effondrement de la biodiversité. Il est d’autant plus urgent d’inventer les services permettant de les maîtriser autant que possible, de s’y adapter, en commençant par la maintenance.

 

Avec l’accumulation de biens et d’infrastructures sur plusieurs siècles, mais confrontés à la limitation des émissions carbone et des ressources, nous devons d’autant plus valoriser le capital productif du patrimoine économique et social déjà existant (environnement naturel compris). Il ne cesse de grandir dans les configurations productives de valeur qui surdéterminent aujourd’hui la performance des entreprises. Ce patrimoine installé est un levier de performance et de valeur, à condition bien sûr d’en user au mieux et de le faire durer, bref, de le maintenir. Il faut faire durer, entre-tenir c’est-à-dire faire tenir ensemble[29]. Cette gestion des usages et la maintenance ne sont plus des accessoires secondaires. On ne peut plus les considérer comme des parents pauvres de la production. Ils sont de plus en plus au centre de la valeur et des emplois. La période récente a vu des services venir soutenir les produits. L’avenir des productions industrielles est maintenant conditionné par leur capacité à se mettre au service des services.

 

 

Une analyse économique[30] d’Olivier Passet.

 

Si l’on considère les relations entre la croissance et l’emploi, un découplage est de plus en plus sensible. Le taux d’emplois a cru (de 66 à 70%) dans les pays de l’OCDE depuis 2008 et en dépit de la crise de 2020. Ce taux aurait dû être bien plus faible si les effets de la croissance sur les emplois étaient restés stables, entre 1992-2007 et 2007 -2022. L’emploi résiste étonnamment bien au ralentissement de la croissance. Si les effets avaient été les mêmes entre les deux périodes, la destruction d’emplois aurait dû être de l’ordre de – 0,4%, il y a eu au contraire une croissance des emplois de + 0,5% (zone Euro). C’est lié en partie au ralentissement démographique dans les pays de la zone Euro. Il y aurait aussi un effet d’une longue période à taux zéro, favorable aux marges. Mais il y a surtout, selon Olivier Passet, une modification de la structure des emplois. Les emplois industriels, directement dépendants de la croissance, sont en réduction. « Nos emplois sont d’abord des emplois dédiés à la maintenance de l’existant (…). A force de nous focaliser sur les flux, nous oublions les moyens croissants que doivent déployer nos économies pour simplement conserver en l’état leur capital matériel et immatériel (…) ». Il y a peut-être une croissance verte, il y a certainement déjà une croissance par la maintenance.

 

Méconnus et méprisés, « silotés » à l’issue d’un demi-siècle d’externalisation, mal valorisés contractuellement, peu formés[31], les métiers de la maintenance, du « soin des choses »[32], de l’attention aux bâtis et au occupants des espaces de travail…, constituent désormais une filière économique et sociale à part entière. Elle est encore sous-estimée[33].

 

Personne ne sait dire exactement ce que représentent les emplois de services de maintenance, mais il est certain que, dépendant des besoins des patrimoines installés, ils croissent en volume et en importance au fur et à mesure des installations récentes qui s’ajoutent aux équipements, aux infrastructures, aux constructions, aux supports matériels, y compris ceux des besoins de l’économie immatérielle[34]. Ils contribuent à la durabilité, la réparabilité, le refus de l’obsolescence prématurée. Ils alimentent les marchés de l’occasion, du réemploi et de la circularité.

 

Un objet s’acquiert, un service est rendu

Vendre un produit consiste à monétiser la valeur produite par un transfert de propriété. La production et la consommation sont séparés, l’une précède l’autre et les acteurs ne se rencontrent pas nécessairement. La responsabilité d’un bon usage est déléguée au nouveau propriétaire. Il possède un droit d’usus (usage) et même d’abusus (destruction ou consumation). Certes, le producteur doit souvent se préoccuper de l’usage (approche marketing) et d’un minimum d’après-vente. Il ajoute des services, au service de la diffusion des produits, pour mieux les vendre. Mais pour les produits/supports tangibles, le principal de qualité promise est réputé acquis par ce transfert de droit.

 

Dans l’achat d’un service, la promesse d’un effet utile de l’engagement subjectif du prestataire (l’intention d’un sujet) sur l’état d’un bénéficiaire (transporté, sécurisé, guéri, informé…) ne passe pas par un transfert de droit de propriété[35]. L’effet utile n’est pas réglé par l’échange commercial, un transfert d’avoir. Il dépend d’une relation qui porte sur l’état du bénéficiaire, son être. L’esclavage et le servage ne sont plus autorisés. Dans une société démocratique et égalitaire comme la nôtre, la mise à disposition temporaire d’une compétence ne peut pas déboucher sur un abusus de la personne, une exigence de servilité[36]. La valeur ajoutée de la production devenue majoritairement servicielle n’est garantie que dans une coproduction et dans une co-évaluation de type systémique. Pour que le travail de l’œuvrant soit performatif, il faut obtenir que le prestataire s’engage subjectivement, et qu’en même temps, le bénéficiaire co-produise.

 

Un service est coproduit, il se « rend ». Comme tel, il est occasion de relation, d’interdépendance et de coopération. Il est producteur de lien social. Même valorisé dans un échange commercial, le service comporte une dimension de don, laquelle appelle un contre-don[37], une rétribution dans l’engagement du bénéficiaire et sa reconnaissance. Dans la modification favorable du bénéficiaire, le service « bien fait » génère du sens, de la pertinence et de la compétence. Parmi les externalités positives de sa mise en œuvre, il construit du lien social. C’est une de ses utilités sociales majeures, trop souvent ignorée et non rétribuée.

 

De ce point de vue, la montée en importance des services comme producteurs de valeur, maintenance inclue, est une bonne nouvelle pour l’environnement et l’économie. La croissance reste possible sans nécessairement consommer en proportion les ressources naturelles et réduire d’autant la biodiversité. Au contraire, la croissance des services est compatible avec un besoin croissant de liens sociaux (de santé, de sécurité) et de simplicité. Encore faut-il qu’ils soient valorisés comme tels et déployés comme des services, et non comme des quasi-biens industrialisables. 

 

 

[1] Voir l’étude avec ARSEG et SYPEMI (sur des infographies de Hent) de mars 2022 « La filière des services aux environnements de travail », https://crdia.org/les-cahiers-du-crdia/ .

[2] En référence à Frederick Winslow Taylor (1856-1915), Henri Fayol (1841-1925) et Henry Ford (1863-1947), pères fondateurs des modèles organisationnels de l’industrie manufacturière moderne (NDLR).

[3] Introduction page 3, Les limites du certain. Affronter les risques dans une nouvelle économie de service », Orio Giarini et Walter R. Stahel, Presses Polytechniques et Universitaires Romandes, 1990, Lausanne Suisse.

[4] Y compris, pour illustrer le phénomène, dans la production de denrées alimentaires : « Mutations du travail : la preuve par la tranche de jambon », Métis Europe 04 février 2013

[5] X. Baron, Pour un autre management des activités de services, Revue CFDT Cadres, octobre 2023.

[6] Evaluée instantanément au moment de la valorisation par l’échange de droit de propriété sur le bien.

[7] « La notion de système est absolument essentielle dans une économie de service ». Giarini et Stahel pp 51-52

[8] De même l’entreprise aujourd’hui doit se comprendre, non comme une entité indépendante, mais comme un élément de « configurations productives » complexes qui la dépassent. CF « De l’entreprise à la configuration productive, travail, emplois, régulation », collectif, Presses de l’Université de Laval, Coll. Sociologie contemporaine, 2023, Canada.

[9] Le néologisme de « servuction » est inventé dans la même période, en 1987 par Pierre Eiglier et Eric Langeard, avec « Servuction : Le marketing des services », Ediscience International.

[10] Giarini et Stahel, Op. cité, p. 85

[11] Giarini Stahel, Op cité 4ème de couverture.

[12] Ce concept est emprunté à la sociologie de la traduction ou théorie des acteurs réseaux (Callon Latour). Dans une approche ergonomique (Rabardel), les concepts et outils de gestion sont des « instruments » composés d’artéfacts (des construits formels) et de schèmes de représentation (l’idée que l’on se fait du réel). Une fois adoptés, technologie, actants ou instruments, agissent sur le réel. Pour la gestion, CF. l’étude fondatrice de Michel Berry (1983) ; Une technologie invisible – L’impact des instruments de gestion sur l’évolution des systèmes humains, CRG – juin.

[13] Key performance Indicators.

[14] Return On Investment.

[15] CF. notre article dans Métis Europe du 06 février 2016, « Quand le client note et juge »,
http://www.metiseurope.eu/quand-le-client-roi-note-et-juge_fr_70_art_30500.htmlb

[16] On pense ici à l’apport de Lucien Karpik (2007), L’économie des singularités, NRF Gallimard.

[17] Nous empruntons cette définition aux économistes des services  et notamment à T.P. Hill (1977, p 336) ; A service is a change in the condition of an economic unit which results from the activity of another economic unit »,  traduite et cité par Jean Gadrey (Services, la productivité en question 1996), p 171 ; « Un service peut être défini comme un changement d’état d’une personne, ou d’un bien appartenant à un agent économique quelconque, changement qui est réalisé par un autre agent économique avec l’accord préalable du premier agent » The review of income and wealth décembre 1977. Voir également, Jean Gadrey « Economie des services » 1992, et des débouchés de ces approches autour de l’économie de la fonctionnalité et de la coopération avec les travaux de Christian du Tertre, de ATEMIS–LIR et de l’IEEFC.

[18] Les organisations tayloriennes cherchent justement cette séparation comme condition de performance, en réduisant autant que possible l’écart entre le prescrit et le réel. Cet idéal est inatteignable comme les ergonomes le démontrent, d’autant plus s’agissant de services coproduits et reconçus à chaque occurrence de mise en œuvre. 

[19] CF Giarini et Stahel, voir la métaphore de la baignoire de la richesse et les développements consacrés à la comptabilisation de la valeur en économie de service, Op cité, pp 142-151.

[20] CF le rapport sur « Les politiques d’exonérations de cotisations sociales ; Une inflexion nécessaire », de Antoine Bozio et Etienne Wasmer, remis le 03 octobre 2024 à Michel Barnier.

[21] Une définition proposée par le Conseil Supérieur de l’Economie Sociale et Solidaire « l’ensemble des conséquences (évolutions, inflexions, changements, ruptures) des activités d’une organisation tant sur les parties prenantes externes (bénéficiaires, usagers, clients) directes ou indirectes de son territoire et internes (salariés, bénévoles, volontaires), que sur la société en général. Dans le secteur de l’économie sociale et solidaire, il est issu de la capacité de l’organisation (ou d’un groupe d’organisations) à anticiper des besoins pas ou mal satisfaits et à y répondre, via ses missions de prévention, réparation ou compensation. Il se traduit en termes de bien-être individuel, de comportements, de capabilités, de pratiques sectorielles, d’innovations sociales ou de décisions publiques. » Voir également par exemple http://www.sfe-asso.fr/sites/default/files/document/file/sfe-cahier-10-utilite-sociale.pdf , « l’Utilité sociale comme critère d’évaluation interroge les champs des valeurs et des représentations sociales, telles que la solidarité, le bien-être individuel et social, le lien social, les biens publics ou les biens collectifs, la cohésion sociale, etc… Ces valeurs constituent également des catégories d’analyse (et d’action) des politiques publiques qui sont à travailler sur un mode dynamique, en mettant en tension les convictions des systèmes d’acteurs en présence » (page 8) et les travaux menés par la Fonda, l’AVISE et le Labo de l’ESS sur la mesure d’impact social ; https://fonda.asso.fr/ressources/la-mesure-dimpact-social-caracteristiques-avantages-et-limites-des-demarches-existantes .

[22] Giarini et Stahel, Op. cité page 29.

[23] EHPAD : Etablissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes, cf. « Les Fossoyeurs », Victor Castanet, Fayard 2022, Prix Albert Londres 2022 (NDLR).

[24] Cette dimension est mise en avant par les approches de l’économie de la fonctionnalité telles que diffusées par ATEMIS et l’IEEFC. En y ajoutant « située », nous assumons volontairement la redondance, dans la volonté de souligner les dimensions géographiques, culturelles et temporelles de cette pertinence fonctionnelle.

[25] X. Baron, « Repenser l’évaluation des services : De la qualité à la pertinence située », Work Place Magazine n° 276, juin 2018, pp 54-56.

[26] Phrase de Jacques Séguéla sur la réussite financière comme critère d’une vie accomplie (NDLR).

[27] Voir là encore les travaux de Lucien Karpic, Op Cité 2007.

[28] Cf. les publication de la CCIP Ile de France  en 2019, Corinne Vadcar « Dynamique servicielle de l’économie française »: https://www.cci-paris-idf.fr/fr/prospective/numerique/economie-servicielle, en 2022 « Quand les produits se transforment en services, la révolution silencieuse des modèles serviciels » : https://www.cci-paris-idf.fr/fr/prospective/produits-transforment-services-revolution-silencieuse-modeles-serviciels, en 2023 « Mode et économie de l’usage » et en 2024, « De la vente d’équipement à celle de l’utilisation ou de la performance », illustrant des évolutions d’un modèle « axé sur l’accès » à un modèle « axé sur l’usage », voire « sur le résultat ». 

[29] Concept emprunté à François Jullien.

[30] Olivier Passet dans Canal Xerfi, https://www.xerficanal.com/economie/emission/Olivier-Passet-Malgre-le-ralentissement-economique-l-emploi-ne-chavire-pas-explication_3751427.html, publié le 13 février 2023

[31] CF Giarini et Stahel, Op. cité p 71.

[32] CF l’important ouvrage de Jérôme Denis et David Pontille, Le soin des choses ; Politiques de la maintenance, La Découverte, Terrains Philosophiques, Octobre 2022 et notre recension dans Métis Europe  https://www.metiseurope.eu/2023/01/23/le-travail-de-maintenance-entre-danse-et-ethique-de-lentretien/ ; Voir également l’ouvrage de Pierre Caye, « Durer : éléments pour la transformation du système productif » et notamment le chapitre 5 consacré à la maintenance.

[33] CF L’étude ARSEG, SYPEMI, CRDIA de mars 2022 dé »jà citée estimant à 102 milliards et 1,4 millions de travailleurs la filière des services aux environnements de travail, soient 1 milliard de m² entretiens et « servicés ». https://crdia.org/les-cahiers-du-crdia/la-filiere-des-services-aux-environnements-de-travail/ .

[34] CF la proposition théorique de Saadi Lahlou dans « Installation Theory : The Societal Construction and Regulation of Behaviour », Cambridge University Press, 2017, indispensable pour les Services aux Environnements de Travail

[35] S’agissant de monétiser la mise à disposition de main d’œuvre à but lucratif, ce serait un délit.

[36] CF. notre article « Des services en extension, au risque de la servilité », publié le 12 juin 2017 dans Métis Europe.

[37] CF Alter N., Donner et prendre : la coopération en entreprise, La Découverte, 2009.